lundi 12 décembre 2011

Changements climatiques : la politique à l’assaut de la science

Nous en sommes à un point où il devient ridicule de nier la réalité des changements climatiques. Il me suffit de regarder par la fenêtre. Il y a vingt ans à peine, mon paysage était couvert d’une épaisse couche de neige à cette époque. Depuis la fin des années 90, ce n’est plus le cas. Des lacs que je connaissais gelés dès décembre ne l’étaient pas encore à la mi-février. D’autres indices le prouvent. Arrivée d’espèce animales traditionnellement présentes à des latitudes plus chades, comme le vautour à tête rouge. Perturbations des migrations d’oiseaux. Disparition à grande vitesse de la calotte glacière.

Le réchauffement climatique par l’activité humaine n’est pas une idée nouvelle. Svante Arrhenius, prix Nobel de chimie, le décrivit dans un article scientifique dès 1896. L’effet de serre était déjà connu depuis plus d’une cinquantaine d’année. On peut noter que les prédictions d’Arrhnius sont en train de se concrétiser avec une remarcable exactitude, mais sur une période beaucoup plus courte que prévue.

Si le réchauffement global était une idée vague à l’époque, elle devient formidablement concrète à notre époque, où elle commence déjà à tuer des milliers de personnes. L’activité économique en est perturbées, et la fonte de glace du pôle nord cause des tensions géopolitiques entre le Canada et la Russie.

Ceci dit, certaines personnes ont un intérêt évident à ce qu’aucune mesure ne soit prise. Ces gens financent grassement la droite politique, si bien qu’elle a envoyé ses mercenaires à l’assaut, ne reculant pas devant les méthodes criminelles lorsqu’il le faut. Le nouvel ennemi: la science.

Micheal E. Mann est un paléoclimatologue respecté, et il est l’un des savants derrière le fameux graphique dit du «bâton de hockey» qui fait pleurer aux néocons des larmes de sang. Dans ce vidéo, il témoigne des méthodes d’intimidation sauvages auxquelles lui et d’autres scientifiques furent confrontés. La vidéo est intéressante, abordant entre autres le prétendu «climate gate» un des épisodes les moins glorieux de la guérilla antiscientifique à laquelle les néocons se livrent depuis que le réchauffement climatique a quitté le camp des théories pour entrer dans celui des phénomènes de la vie quotidienne.

Politiciens contre scientifiques

La joute entre les politiciens et les scientifiques est inégale. Les politiciens peuvent mentir autant qu’ils le veulent, exagérer, grossir; c’est ce à quoi on s’attend de leur part. Les scientifiques, de leur côté, jouent leur réputation, donc leur carrière, à chaque déclaration. Ils doivent peser leurs interventions, se montrer prudents. Dans le monde des médias, où reigne le clip de huit secondes ou moins, le politicien règne, avec son sens de la formule. Aucun énoncé scientique ne peut tenir en huit secondes.

Dans la conférence de Michael Mann, on peut remarquer son manque de charisme, de présence. C’est un scientifique, pas un animateur. Les exigences de la carrière de scientifique ne comprennent pas la communication. Il leur faut de l’intelligence, de la curiosité, de la prudence. Il est très clair maintenant que quelqu’un peut réussir en politique sans grandes compétences intellectuelles. La recette de la droite est infaillible: flatter la masse des motivés avec des discours populiste, en forçant l’opposition à se diviser. Heureusement que, dans ce cas précis, la communauté scientifique en est arrivé à un consensus assez solide pour que la division ne prenne pas. Reste que proférer une affirmation grossière ne prend qu’une seconde. Développer une étude sérieuse exige des années. Michelle Bachman peut affirmer que les ouragans sont une punition de Dieu pour les politiques «libérales» d’Obama; un scientifique, en face, ne peut affirmer qu’ils sont l’effet du réchauffement global. Au mieux pourra-t-il dire que «les phénomènes climates extrêmes tendent à devenir plus fréquents et plus violents», ce qui est à la fois vrai et évident, mais passe beaucoup moins bien au journal de six heures.

Tous les coups sont permis

Les négationnistes affirment sans se gêner que les climatologues qui sonnent l’alarme sont «intéressés», qu’ils le font pour protéger leur «subventions». Hors, il est clair que c’est justement l’inverse. Les gouvernement néocons coupent dans la recherche scientifique sur le climat. Il y a des exemples encore plus cyniques comme ce brise-glace consacré à la recherche sur les changements climatiques, et maintenant consacré à la recherche de nouvelles nappes de pétrole. Maintenant que le réchauffement global nous a ouvert la voie, utilisons les ressources scientifiques pour l’accélérer!

la guerre contre la science ne date pas d’hier

La méthode scientique est une invention de Galilée. Il est intéressant de constater qu'il fut la première victime de la cabale antiscience de la droite. Ainsi, il dut rétracter l’idée farfelue que la terre tournait sur elle même et autour du soleil, et termina sa vie en résidence surveillée.

Pasteur fut critiqué pour son idée idiote selon laquelle se laver les mains et désinfecter ses instruments chirurgicaux diminuerait les risque postopératoires. La plupart des médecins poussèrent de hauts cris et le traitèrent de charlatant. Pourtant, sa méthode ne mit pas de temps à s’imposer, alors que des idées plus anciennes comme l’homéopathie attendent encore d’être démontrées. Comme quoi, quand les résultats sont là...

Au dix-neuvième siècle, les scientifiques avaient déjà admis que les animaux évoluaient, mais n’arrivaient pas à se mettre d’accord sur les causes de ce phénomène bien documenté. Charles Darwin proposa sa solution: la sélection naturelle, un procédé si simple et si évident qu’il devint la base de toute la théorie de l’évolution. Le soucis avec Darwin, c’esgt qu’il était immensément connu, suite à sa publication des voyages du Beagle. La sélection naturelle mit sur la place publique cette idée, déjà un consensus scientifique basé sur des observations nombreuses et bien étayées, qui les animaux évoluaient et, pire, que les humains n’étaient pas un cas à part. La droite religieuse se déchaîna sur Darwin, alors que la droite idéologique repris ses idées de travers pour en faire le très improprement nommé «darwinisme social». Encore de nos jours, alors que toute la biologie, la médecine et une bonne partie de la psychologie repose sur les assises de la sélection naturelle, certains politiciens continuent de lutter pour effacer jusqu’à l’idée de l’évolution.

Les sciences pures ne sont pas les seules en bute à la résistance aussi acharnée qu’absurde de la droite. Les science humaines, les sciences sociales en particulier, sont un front de guerre, comme en témoigne la décision des néocons canadiens de supprimer l’obligation de remplir le formulaire long du recenssement, ce qui a pour effet d’en rendre les résultats invalides. Lorsque les études sur la progression montrent que le taux de criminalité baisse sans cesse, les conservateurs nient encore une fois l’évidence. La vérité est leur ennemie, aussi ils tentent de l’étouffer. Leur acharnement à nier les faits prouvés, à détourner le regard de l’évidence et à s’enfermer dans une idéologie aveugle donne à penser qu’ils n’y croient pas eux même, mais servent simplement leurs intérêts mesquins en toute connaissance de cause.

Et la gauche?

On entends souvent les critiques de la gauche venir appuyer les scientifiques. La science, après tout, est du côté de la vérité.

Force est de constater, cependant, que la gauche ne sert pas à grand chose dans ce débat. Avec son refus catégorique de tout compromis, elle continue à montrer un front désuni. Ayant accepté la logique de la défense permanente qui est le jeu des néocons, la gauche ne peut que perdre du terrain pouce par pouce, sans jamais en gagner.

Alliés de la science: vérité et éducation

La science, au contraire de la gauche, ne peut pas vraiment reculer. Les connaissances s’accumulent, il est très difficile de les détruire. Ces connaissances sont la base d’une économie forte et de la puissance militaire, et en conséquence même la droite ne peut s’en passer. On peut nier l’évolution, reste qu’elle est observable tout autour de nous, dans des phénomènes comme le développement de résistances aux antibiotiques chez les bactéries, phénomène impossible à ignorer sans en payer immédiatement un prix terrifiant. Le réchauffement global est une évidence du même bois; même les néocons l’admettent aujourd’hui, eux qui jouent à envoyer les navires militaires «occuper» les espaces nouvellement déglacés au profit de leurs financiers du pétrole.

Les néocons ont cependant trouvé une manière en or de profiter des progrès procurés par la science tout en continuant à la bafouer sur la place publique: lutter contre l’éducation et l’accessibilité aux études. Des idées néocons comme les bons à l’éducation par exemple, ou l’élimination de la sécurité d’emploi pour les professeurs, leur «evaluation» telle que préconisée par le CAQ, sont des manières de s’assurer d’une confortable ignorance au sein de la masse. Car l’ennemi à leurs yeux n’est pas la science, mais la vérité. Il est toujours plus facile de mentir à un ignorant.

Il faudrait peut-ête cesser d’ignorer les revendications étudiantes et se rendre compte que nous avons tout à gagner à vivre dans une société éduquée. Il faudrait se rendre compte que la culture scientifique est une partie essentielle de la culture générale. Et il faudrait peut-être sortir de notre apatie et nous rendre compte que si le Canada tient à ses néocons, nous ne devrions peut-être pas tenir au Canada.

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